vendredi 1 janvier 2016

CHAPITRE 21 : VOYAGE AU BOUT DU PASSE

   L’heure du dîner approchait. Les autres invités d’Oblodiye se dirigeaient par petits groupes vers le château, soucieux d’avoir le temps de se changer avant le repas. Marie, quant à elle, avait décidé de ne pas y paraître ; après avoir affronté tous ces gens un par un au cours de la journée, elle n’avait plus qu’une idée en tête, se retrouver seule, loin d’eux, enfin en paix.
   Elle s’était donc éloignée à regret de Wladimir, feignant partir à la recherche de ses parents, pour éviter d’avoir à répondre à d’éventuelles questions gênantes. Après avoir erré quelque temps dans les jardins, elle s’était décidée à pénétré à son tour dans la vaste demeure et se trouvait dans l’escalier quand une voix retentit à ses oreilles :
   « Toutes mes félicitations, jeune fille ! Mission accomplie.
   - Votre Altesse ! Je … je … pas tout à fait.
   - Vous semblez bien émotive tout d’un coup. Vous aurais-je surprise ?
   - Oui, Altesse. Un peu. Je … je l’avoue. Je me sens un peu fatiguée … et puis il me manque le pardon du principal offensé : le vôtre. »
   Les yeux verts se trouvaient comme la veille exactement à la hauteur de son visage.
   « Maria Petrovna, je croyais que vous aviez compris que mon pardon irait de soi, une fois celui des autres obtenu. Je vous pardonne, Marie. Je vous retrouverai avec plaisir tout à l’heure à table. Allez vite vous changer.
   - Altesse … voilà, je …D’abord, je voulais vous remercier, vous redire à quel point je suis désolée et que … que je ne pense pas descendre dîner. Je vous l’ai dit, je me sens fatiguée.
   - Marie, vous avez des défauts comme nous tous mais jusqu’à présent la lâcheté n’en faisait pas partie. Non, ne protestez pas ! Ce que vous appelez fatigue n’est qu’une peur déguisée de vous trouver de nouveau devant tous ces gens. Ecoutez-moi, jeune fille, je suis fier de vous ; vous avez montré beaucoup de persévérance et de courage aujourd’hui. Ne renoncez pas devant le dernier obstacle. Notre réconciliation doit être publique ainsi que l’annonce de notre petit voyage à Orenbourg demain. Si vous souhaitez toujours vous y rendre bien sûr.
   - Oh … euh … oui. Merci pour … pour vos encouragements.
   - A tout de suite alors.
   - Oui, Altesse, à tout de suite. »
   Marie se dépêcha de grimper l’escalier afin de cacher son trouble ; dans son esprit la joie d’avoir entendu le prince la complimenter s’ajoutait maintenant à la fatigue, à la crainte de les revoir tous et à l’émotion si particulière qu’elle venait de ressentir face à Wladimir.  

   Quelques instants plus tard, sans bien comprendre pourquoi, la petite fille s’était préparée comme jamais encore auparavant. Non seulement elle avait choisi sa plus belle robe, accepté la savante coiffure proposée par sa gouvernante mais elle s’était également parée des bijoux que ses parents lui avaient offert au fil des ans. Ce soir-là, ce fut donc vêtue d’une robe de soie verte ornée de la dentelle la plus fine, d’un collier d’argent et d’ambre assorti à un bracelet et à des pendants d’oreilles que Marie fit son apparition dans le petit salon jouxtant sa chambre. Une servante venait de la prévenir qu’on l’y demandait et elle s’était imaginé que ses parents craignant, eux aussi, qu’elle renonce à paraître au dîner voulaient lui faire comprendre qu’ils étaient là pour l’accompagner.
   Effectivement, tous deux se trouvaient bien au salon mais ils n’étaient pas seuls, un jeune homme, portant l’uniforme des cadets du Tsar regardait le jour décliner dans l’embrasure de la fenêtre. En entendant Marie pénétrer dans la pièce, il se retourna et resta aussi stupéfait en la découvrant que Pierre et Anissia. La surprise fut réciproque et la petite fille dut se retenir au chambranle de la porte ; sanglé dans sa veste blanche ornée de boutons d’argent, la taille prise dans un fin pantalon de flanelle, Wladimir était impressionnant. La découpe cintrée de l’uniforme, en faisant ressortir ses larges épaules, lui donnait l’apparence d’un homme mûr. La bande qui courait sur le côté du pantalon semblait souligner encore les longues jambes de celui qui, malgré son jeune âge, les dominait tous. La ceinture dorée qui ceignait sa taille révélait l’emplacement réservé en d’autres circonstances à l’épée symbole à la fois de sa haute lignée et de son esprit guerrier. 
   Ce fut lui qui se ressaisit le premier et qui, s’inclinant devant elle, lui proposa son bras. 
   « Maria Petrovna, voulez-vous me faire l’honneur de m’accompagner jusqu’à la salle à manger ?
   - Ou … oui, Votre Altesse, merci.
   - C’est moi qui vous remercie. Je vais faire sensation en entrant au bras d’une si belle jeune fille. »
   Malgré l’émotion qui lui nouait le ventre, Marie ne put résister à la tentation de plaisanter :
   « Je croyais que j’étais un étrange petit lutin.
   - Un lutin possède le pouvoir de se transformer, l’ignorez-vous ? Allons, venez, j’ai hâte d’observer leur réaction à tous lorsqu’ils vous découvriront. Décidément, vous avez le don de surprendre les gens. On ne doit guère s’ennuyer en votre compagnie. »
   Machinalement, Wladimir s’était tourné vers Pierre et Anissia qui en profitèrent pour montrer à leur fille à quel point ils appréciaient ses efforts.
   « Vous avez raison, Altesse ; Marie ne cesse de nous étonner sa mère et moi.
   - Tu es ravissante, ma chérie. Vraiment. Une excellente façon de tourner la page. »

   En un éclair, Marie comprit qu’elle venait de reproduire le comportement d’Anissia lorsque celle-ci se sentait mal à l’aise ; se confectionner une sorte d’armure derrière laquelle elle pouvait disparaître. Etait-ce cela devenir adulte ? Déguiser ? L’idée lui déplaisait mais il ne semblait pas possible d’agir autrement ; par exemple, répondre franchement à la question du prince Wladimir était tout simplement impensable.
   « Auriez-vous froid ? Il me semble que vous tremblez.
   - Peut-être l’effet de cette fenêtre ouverte. Ce n’est rien, Altesse, ne vous inquiétez pas. »
   Comment avouer en effet que c’était le contact de sa main qui venait de provoquer ce frisson, que c’était la prise de conscience de l’existence d’un sentiment nouveau, impensable pour elle jusqu’alors, qui la bouleversait. Il valait bien mieux parler de fenêtre …
   « Wladimir. »
   Ils avaient commencé à descendre vers l’immense salle du rez-de-chaussée.
   « Comment ? Vous … vous m’avez …
   - J’ai dit Wladimir. Altesse est un terme bien trop pompeux pour des amis. Et nous sommes amis maintenant, n’est-ce pas ? »
   Impossible de répondre : non, nous ne sommes pas amis, je ne sais pas ce que je veux de vous mais certainement pas une de ces amitiés tièdes de bonne société.
   « Oui, Altesse … je veux dire Wladimir Nikolaïevitch. Nous sommes amis. C’est un honneur pour …
   - Ne recommencez pas, Maria Petrovna ; l’honneur est …
   - Marie. 
   - Pardon ?
   - Appelez-moi Marie, juste Marie, s’il vous plaît. »
   Le bras de la petite était toujours glissé sous celui de Wladimir. Le jeune homme s’arrêta, laissant Anissia et Pierre les dépasser ; visiblement, il souhaitait lui parler.
   « Bien. Dîtes-moi, Marie, mon père m’a parlé de sa proposition de vous conduire demain à Orenbourg ; verriez-vous un inconvénient à ce que je me joigne à vous ?
   - Mais … bien sûr que non. C’est … c’est une curieuse question ; vous êtes chez vous à Orenbourg.
   - Oui, Marie. Mais demain sera votre journée. Je ne veux pas vous gêner.
   - Comment pourriez-vous me gêner ? Mais pourquoi …
   - Pourquoi ? Pas vraiment pour aller sur la tombe d’Igor ; j’y vais tous les jours, mais parce que j’aime votre compagnie et que j’ai bien peur de m’ennuyer ici sans vous.
   - Vous allez tous les jours sur la tombe d’Igor ?
   - Oui. Je lui dois bien ça … il m’a sauvé la vie. C’était à Moscou, en hiver, j’avais cinq ans, la glace d’un étang a cédé sous mon poids. Sans Igor … je ne serais pas devant vous en ce moment. Je m’en souviens comme si c’était hier. C’est la seule fois où j’ai vu Son Altesse Nikolaï pleurer.
   - Votre père … pleurer ?
   - Il était trop loin. Quand il est arrivé, il a cru que j’étais mort. Je n’oublierai jamais son visage à ce moment-là. Ni la force avec laquelle il me serrait dans ses bras. Il a bien failli étouffer Igor aussi. Ensuite, il l’a affranchi.
   - Affranchi ? Alors, Igor n’était plus …
   - Non. Mademoiselle, vous êtes la fille d’un homme libre. Enfin … je … je sais bien que vous êtes la fille de Monsieur de Fronsac mais … mais je suis heureux que … enfin qu’Igor …
   - Je comprends, Alt … Wladimir Nikolaïevitch. Merci de m’avoir raconté cette histoire.
   - J’avoue que je n’ai pas beaucoup d’autres souvenirs de lui. Il est … parti peu de temps après. Mais si vous avez des questions, je peux essayer d’y répondre.
   - A vrai dire … ça n’a pas de rapport avec Igor mais … pourquoi cet uniforme.
   - Il ne vous plaît pas ?
   - Oh que si … »
   
   Marie se mordit les lèvres, maudissant sa spontanéité maladive ; Wladimir souriait.
   « Petite Marie, c’est celui des cadets du Tsar. J’y ai fait mon entrée il y a six mois et j’y retournerai sitôt le mariage de Nina célébré.
   - Pourquoi Wladimir Nikolaïevitch ? Je veux dire pourquoi vouloir vous préparer à la guerre ?
   - C’est notre rôle de défendre le peuple. Sa Majesté peut avoir besoin de nous. La situation en Sibérie n’est pas vraiment stabilisée.
   - Tous les nobles ne deviennent pas cadets.
   - Moi, oui. Comme mon père l’a été avant moi.
   - Et vos frères ? Eux aussi …
   - Sergueï est un rêveur qui n’aime que les livres. Quant à Ilya, il voulait le faire mais en tant qu’héritier il a très vite eu des responsabilités de tous ordres à assumer.
   - Je vois. Je continue à penser que c’est dangereux pourtant.
   - Allons, petit lutin, ne me dîtes pas que vous vous inquiétez pour moi. »
   Marie ne répondit pas. La main de Wladimir caressait doucement sa joue. Au bout de quelques secondes, sans un mot, ils reprirent le chemin de la salle à manger. Quand les valets poussèrent la porte devant eux, un brouhaha les assaillit ; visiblement tous les autres convives étaient déjà arrivés. Ce furent donc des dizaines de regards qui se posèrent sur eux dès leur entrée. Curieusement, Marie qui avait tellement redouté ce moment, trouva tout d’un coup qu’il était finalement assez facile de se présenter devant cette assemblée, ainsi vêtue, coiffée, parée et … au bras d’un beau militaire.
   Un discret signe de Nikolaï attira l’attention de Wladimir ; le jeune homme se dirigea alors vers lui, entraînant à sa suite sa jeune cavalière. Marie passa rapidement du bras du fils à celui du père.  
   « Chers amis, je vous demande deux secondes d’attention. Je ne reviendrai pas sur ce qui s’est passé ici hier. Vous avez tous reçu la visite de Maria Petrovna aujourd’hui. Nous sommes donc réconciliés et tout est oublié. Je voulais juste vous annoncer que vous devrez vous passer de la présence de notre jeune amie pendant deux jours ; conformément à notre accord, je l’emmène demain à Orenbourg. En compagnie de ses parents s’ils y consentent bien sûr. »
   Pierre et Anissia acceptèrent avec plaisir la proposition de Nikolaï. Marie imaginait aisément à quel point l’idée de se recueillir sur la tombe d’Igor pouvait perturber sa jeune maman mais elle savait qu’Anissia voulait elle aussi aller jusqu’au bout. Quant à elle, elle avait une idée assez précise de la façon dont elle voulait en finir.
   « Votre Altesse, je voudrais vous demander une faveur.
   - Je vous écoute, Maria Petrovna.
   - J’aimerais que Piotr Ivanovitch nous accompagne. 
   - Petite, Piotr n’a nul besoin de ma permission pour venir à Orenbourg ; il y est chez lui. Je pense qu’il sera ravi de se joindre à nous. »
   Un coup d’œil en direction du marchand leur confirma la chose. 

   Le carrosse roulait depuis plusieurs heures et pourtant Marie n’avait pas cessé de sourire depuis le départ. Elle n’aurait rien pu souhaiter de mieux ; en face d’elle se tenait ses parents, heureux, détendus, amoureux, à côté d’elle, sa main glissée entre les siennes, Piotr devisait gaiement avec eux, là-haut, assis à la place du deuxième cocher, Liova veillait tandis que Wladimir et son père chevauchaient à quelques mètres de la voiture.
   La veille, le dîner s’était merveilleusement bien passé ; tout le monde s’était montré souriant, aimable et attentionné à son égard. Les yeux de Wladimir ne l’avaient pratiquement pas quittée de la soirée et quand elle s’était retirée, de bonne heure en prévision de la journée qu’elle était en train de vivre maintenant, une ombre de déception les avait voilés l’espace d’un instant.
   Pour l’heure, Orenbourg semblait maintenant tout proche. Marie le sentit à la façon dont Piotr s’était progressivement retiré de la conversation. Il s’était redressé et semblait littéralement humer l’air à l’extérieur du carrosse. Sa main que la petite serrait toujours entre les siennes semblait animée d’une vie propre ; tantôt caressante, tantôt nerveuse et prête à fuir, tantôt semblable à une poigne de fer lui broyant presque les os. En le voyant si impatient, Marie ne put s’empêcher de lui murmurer à l’oreille. 
   « Vous n’aimez pas Oblodiye mais l’amour pour cette terre-ci vous ne pouvez le nier. »
   Pour toute réponse, Piotr baisa les doigts que sa hâte martyrisait. Et sauta hors de la voiture dès qu’il le put. Le carrosse venait à peine de s’immobiliser devant le château que le marchand se précipitait déjà vers le bâtiment sous l’œil incrédule de Liova. Saluant au passage les domestiques massés sur le perron, le maître s’engouffra dans l’entrée suivi de son serviteur qui n’eut que le temps d’échanger un regard à la fois complice et étonné avec Marie.
   A quelques pas de là, le véritable maître des lieux et son fils mettaient pied à terre à leur tour. Nikolaï se mit à rire devant la surprise qui flottait encore sur les traits de Marie.
   « Ne vous avais-je pas dit que Piotr était ici chez lui ?
   - Certes, Altesse, mais je pensais que c’était une formule, que … Il ne vous a même pas attendu !
   - Il a tant de choses à revoir. Nous le retrouverons plus tard, ne craignez rien. Et bien, que me dîtes-vous d’Orenbourg ? 
   - Que … que c’est très … surprenant. Très différent d’Oblodiye.
   - Que de diplomatie, Maria Petrovna ! Avouez plutôt que vous ne vous attendiez pas à un aussi petit château. »
   A vrai dire, jusque là Marie n’avait pas vraiment prêté attention au bâtiment qui s’élevait derrière eux. Sidérée par l’attitude de Piotr, elle n’avait fait que jeter un œil distrait à ce qui l’entourait. Maintenant qu’elle prenait le temps de l’observer, elle découvrait un château somme toute assez semblable à celui dans lequel elle vivait en France. Une façade dorée rehaussée de vert, un parc admirablement entretenu, des proportions harmonieuses ; l’édifice suggérait le calme de la vie à la campagne, le confort sans le luxe, l’intimité avec des domestiques connus depuis l’enfance.
   L’accueil que ceux-ci réservèrent au maître, sans servilité aucune mais au contraire avec un réel plaisir de le revoir plus tôt que prévu, conforta la petite fille dans son idée. Elle ne put s’empêcher de faire part de ses réflexions à Nikolaï.
   « J’imagine qu’Orenbourg est très différent de vos autres palais. Ici, on se sent bien, comme si on rentrait à la maison.
   - Voilà un jugement qui me fait plaisir. C’est vrai que c’est un endroit très reposant, très agréable.
   - Quand on n’y est pas prisonnier.
   - Quoi ? »
   Marie se mordit la langue jusqu’au sang ; elle n’apprendrait donc jamais à se taire ! Quel besoin avait-elle de montrer à Nikolaï que Piotr lui avait révélé bien des choses et pas seulement sur le passé d’Anissia !
   « Je vais dire deux mots à Piotr ! »
   Le prince souriait ; ni vraiment furieux, ni totalement surpris, il semblait tout de même un peu décontenancé. Il se reprit pourtant et enchaîna avant que Marie n’ait eu le temps de s’excuser.
   « Après tout, c’est aussi bien comme ça. Il n’y aura plus de zones d’ombre. Le fait de savoir que Sa Majesté m’avait exilé ici pour m’empêcher de continuer à me détruire te donne une idée plus juste de qui je suis exactement. J’ajouterai seulement que le remède n’a été efficace que parce que Vania a atterri dans mon poulailler. Mais ça c’est une autre histoire … »
   Nikolaï s’interrompit, regarda Marie et éclata de rire.
   « Je vois que tu es déjà au courant. Piotr ne perd rien pour attendre. Pour l’heure, je vais donner des ordres pour que l’on vous loge pour la nuit. Ensuite nous irons jusqu’au cimetière.»

   Une heure plus tard, la compagnie se retrouva dans l’entrée pour parcourir en une espèce de procession les quelques mètres qui séparaient le château de la petite chapelle. Sur le côté, une grille en fer forgé toujours entrouverte invitait à se recueillir dans une sorte de jardin aux allées bordées de roses. En cette belle soirée d’été, leur délicat parfum s’exhalait, se mêlant à l’odeur du chèvrefeuille qui courait le long des hauts murs.
   Une trentaine de tombes se trouvaient réparties au gré des allées ; Nikolaï dirigea la petite troupe vers la gauche, passa devant un magnifique laurier-rose, fit quelques pas avant de s’arrêter devant une tombe. Le cœur battant, Marie répondit à son appel et se porta à sa hauteur. Un prénom était gravé sur la pierre : Igor. Autour, d’autres tombes : Irina, Mikhaïl, Anton … Mère, père, frères et sœurs ; Igor était bien entouré. 
   Passant un bras autour de ses épaules, Nikolaï attira la petite fille contre lui.
   « Marie, nous y sommes. Maintenant, tu sais tout. L’histoire est finie.
   - Presque, Votre Altesse. » 
   En disant ces mots, la petite se détourna. Elle tendit la main, Piotr comprit ; il s’approcha et s’en empara. 
   « Maintenant, tout le monde est là. Toutes les ombres se dissipent. »
   Un coup d’œil derrière elle suffit à lui prouver qu’elle avait raison ; à quelques pas de là, un couple enlacé les observait ; Anissia laissait la paix descendre lentement dans son âme. Un peu plus loin, Liova veillait, d’une brève inclinaison de tête, il lui montra qu’il était toujours attentif à son bien-être et qu’il se réjouissait pour elle. Marie balaya le reste du cimetière des yeux et finit par découvrir celui qu’elle cherchait ; appuyé contre une tombe, bras croisés, tête légèrement inclinée, Wladimir se détachait dans le soleil couchant.

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